mercredi 25 mars 2009

Sénégal : Le « Sopi » de Wade devient « Saapi »

La coalition « Sopi » (changement en ouolof) vient de ramasser une mémorable veste aux élections locales, municipales et régionales de dimanche dernier. Lasse des excentricités des principaux ténors du régime au pouvoir, la majorité des Sénégalais a affiché son désamour avec Wade et sa famille, battus dans leur propre bureau de vote. Désormais « Sopi » rime avec « Saapi » (dégoût en ouolof) pour les jeunes électeurs.

Sitôt le crépuscule tombé avec la fin des premiers dépouillements dans les bureaux de vote qui ont ouvert plus tôt dans la matinée du dimanche, plusieurs jeunes de la commune d’arrondissement de Sicap Mermoz à Dakar, ont manifesté bruyamment leurs joies à l’annonce de la victoire de la coalition Benno Siggil Senegal, la liste unique confectionnée pour ces élections locales par les principaux leaders de l’opposition.

Un sentiment largement répandu dans la plupart des arrondissements des grandes villes du pays, où les listes de la majorité présidentielle se sont effondrées. Dakar, Saint-Louis, et Rufisque ont basculé dans les mains de l’opposition. En revanche, Ziguinchor dans le sud du pays a connu le chemin inverse. Mais de tous les résultats, ce sont ceux de Dakar qui ont le plus attiré les commentaires avec la large défaite dans leur propre bureau de vote du président Abdoulaye Wade et de son fils putatif, Karim.

Un fait anecdotique qui révèle le désamour entre les électeurs et le chef de l’Etat, pourtant ancien opposant qui a réussi au bout de 26 ans de combat politique à obtenir la première alternance par les urnes dans le Sénégal de l’après indépendance. Mieux, en choisissant de s’investir personnellement dans une campagne au demeurant locale, le président Wade a donné à ses consultations une allure de référendum à sa gouvernance très décriée ces dernières années par ces adversaires qui soupçonnent une dévolution monarchique du pouvoir avec l’entrée du fils, Karim dans l’espace politique.

Le « gosse » a déjà croqué deux Premiers Ministres - Idrissa Seck et Macky Sall -, qui affichant très tôt leurs ambitions présidentielles ont failli faire de l’ombre au fils du président. Les deux anciens chefs de gouvernement, mis au ban et contraints de créer leurs partis, ont gagné dans leurs fiefs politiques respectivement à Thiès et à Fatick, dans le centre du pays, selon les résultats provisoires annoncés lundi par les administrations locales en charge de l’organisation des élections.

Abdoulaye Wade, dont la réélection dès le premier tour de l’élection présidentielle de 2007 a été contestée par ses principaux challengers, est ainsi contraint par les urnes de composer jusqu’à la fin de son mandat en 2012 avec de nouveaux maires de l’opposition. Une situation inconfortable pour celui qui espère « céder le pouvoir à une génération de constructeurs », formule qui rime bien avec « génération du concret », le mouvement de Karim Wade qui dans sa chute électorale, a emporté son n°2, Hassane Ba, ministre conseiller spécial du président de la république, battu dans son village de Boyinadji par les partisans de l’ancien Premier ministre Macky Sall.

Dans le même registre, plusieurs éminents ministres laissent des plumes dans ce combat des locales notamment le ministre d’Etat en charge de l’Intérieur, Cheikh Tidiane Sy dont l’administration organise les élections ainsi que son collègue et prédécesseur, Ousmane Ngom, passés tous deux à la trappe à Saint-Louis ansi que le ministre de l’Education nationale, Moustapha Sourang, défait à Thiès.
Ainsi dans le Sénégal d’aujourd’hui, le « Saapi » s’en prend à tous ceux qui se réclament du « wadisme ». A trois ans de la présidentielle, ce n’est pas bon signe pour la Coalition au pouvoir qui espère « régner 40 ans de plus » sur le pays.

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